Portrait du mois : Ce n’est qu’un au revoir Alexandre !

  • 12 avril 2021
  • Elus - Enseignants - Jeunes - Parents - Professionnels de l’animation

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J’ai choisi pour deux raisons d’aller à la rencontre d’Alexandre JUNIER, dont la fonction est « Inspecteur Jeunesse et Sports de l’Ariège » (je ne suis pas sûre qu’on dise comme cela, mais pour moi, ça a du sens !).

La première raison, c’est qu’il va quitter son poste actuel en Ariège pour aller rejoindre Paris et le Ministère de l’Intérieur et que c’est une façon de lui dire au revoir ; la deuxième, c’est que j’ai une tendresse particulière pour ce jeune homme brillant et ambitieux chez qui je décèle cependant douceur et altruisme.

Il est né en 1994, à côté de Lyon, de maman commerciale et de papa fonctionnaire territorial. Il a une « petite sœur » (comme il la qualifie) dont il est proche.

Une histoire d’amour…avec le costume de préfet

Il grandit à Saint-Etienne, entre les Hauts Fourneaux, l’AS Saint-Étienne et la MJC du quartier.

C’est en fréquentant cette Maison des Jeunes, alors qu’il fait parti d’un programme d’échange avec le Benin, qu’il va rencontrer le Préfet de la Loire (ce jour-là en uniforme), et le Directeur Départemental de la Jeunesse et des Sports.

Il est en CM2. Ce jour-là, il tombe amoureux du Costume de Préfet et il est subjugué par la capacité d’un directeur de service de l’Etat à avoir tant de proximité et d’écoute. Voilà certainement à quel moment est née sa vocation.

C’est donc avec la ferme intention de rentrer dans la Fonction Publique d’Etat que plus tard il intègre Sciences Po à Rennes.

Les concours d’entrées de Jeunesse et Sports lui tiennent plus à cœur que les autres. 

« l’Educ Pop » l’a construit, il ne l’oubliera jamais. Il décide alors de passer le concours d’Inspecteur.

Très attiré par les sports de montagne, il cherche une terre d’accueil rurale et différente des villes qu’il connait. Ayant réussi le concours avec brio, il demande donc son affectation en Ariège, par choix.

L’Ariège à 23 ans

Quand il arrive à Foix, il n’a que 23 ans mais est déjà très riche des valeurs inculquées par ses parents que sont le respect, l’humilité et l’humanité. Il n’en est pas moins ambitieux et exigeant avec lui-même.

Il dit être né professionnellement en Ariège ; « Ici, on ne peut pas se cacher, cela m’oblige à travailler l’humilité et cela m’a permis de tester ma capacité d’adaptation ».
S’il a été subjugué très jeune par les ors de la République, Alexandre aime surtout avoir les mains dans le cambouis.

Il déteste les injustices et la valeur de la république qu’il met en avant est celle de l’Egalité.

Egalité entre les hommes mais également égalité entre les territoires.

Il a la fonction publique chevillée au corps.
Après 4 années passées en Ariège, je lui ai demandé de choisir 3 moments symboliques.
Il se souvient de son premier bain dans les « Territoires Educatifs » ariégeois, lors de la signature du Projet Départemental pour des Politiques Educatives Concertées, quand les bataclowns nous ont tous gentiment moqués en nous disant que le seul jeune présent dans la salle c’était celui en costard assis derrière la Préfète Lajus, et de désigner Alexandre, sous l’hilarité de toute la salle.

Il me dit avoir beaucoup ri et en rire encore.

Cloisonner ses univers

Le deuxième souvenir indélébile est celui d’un coucher de soleil en haut du Mont-Vallier en arrivant au refuge. A ce moment précis, avec une vue à 360°, Alexandre accède au sentiment de plénitude. Ce fut pour lui une prise de recul nécessaire et essentielle.

La dernière symbolique n’est pas un souvenir, c’est une frustration, celle de pas avoir pu clore son aventure ariègeoise comme il l’aurait souhaité. Après 4 années rendues à la Jeunesse et Sport, confinement oblige, il n’a pas pu réunir les gens qui ont comptés pour lui. Cela lui est très douloureux, comme un goût d’inachevé. Il me dit qu’il redoute ce vendredi 16 avril, qu’il n’arrive pas à dire au revoir, que ses larmes vont surement couler à ce moment-là, « un trajet de 7h de pleurs et de catharsis » rajoute t il …
Cette mise à nue me touche. Ce n’est pas dans ses habitudes.

Alexandre est un homme très discret sur sa vie personnelle et sur ses sentiments. Par choix, il cloisonne ses univers, se dévoile peu et cache ses fragilités. Il a besoin de temps pour être en confiance.
Et puis il considère que ce qui relève de l’intime n’est pas intéressant pour les autres.

Ce qu’il leur doit, c’est l’écoute.

Il rajoute « si chacun prenait le temps d’écouter l’autre, cela permettrait de régler beaucoup de choses en amont ».

Je reconnais là le socle éducatif de parents surement exigeants et humanistes à la fois. Cette éducation lui impose la remise en cause pour ne pas perdre ses illusions. Il ne voudrait pas être déçu de lui-même. Alors, il se rappelle toujours à lui-même la grandeur des devoirs qu’il s’est imposé.

Le départ pour la capitale : un cheminement

Le départ d’Alexandre vers la Capitale est la suite logique de son cheminement intellectuel.

Dans son futur poste, il sera chargé de développer les interactions interministérielles et il y voit une réelle opportunité de valoriser les territoires. En contact direct avec tous les acteurs locaux, son poste en Ariège lui a permis d’avoir un éventail de connaissances et de mises en pratiques très large, très ancrées dans la réalité du terrain. Je suis certaine qu’il saura l’utiliser pour mieux servir.

Notre discussion touche à sa fin (entretien réalisé sur les chapeaux de roues, car fonction d’Etat oblige mais sans jamais donner l’impression d’être pressé !) et je lui demande s’il veut conclure :

« Ces années passées à vos côtés, au travers de rencontres professionnelles et personnelles, m’ont formées. J’y ai trouvé compétences et qualités humaines. » « Je reviendrai cet été pour vous voir à tous, boire un coup tous ensemble et se dire qu’on se reverra, c’est certain !»
« Je vous remercie »

Nous aussi, on te remercie Alexandre et on te souhaite bon vent, car la vie est toujours devant.

Interview et portrait réalisés par Marine Bordes