Le cœur d’Arnaud, aux manettes d’un projet connecté et solidaire

  • 22 novembre 2022
  • Elus - Enseignants - Jeunes - Parents - Professionnels de l’animation

Actualités du réseau Jeunesse Vie associative

C’est derrière un écran, après qu’il m’ait initiée à la création d’une communauté « Discord » pour les besoins de l’expérimentation « AJIR », que j’ai réalisé l’interview d’Arnaud FROCHOSO, un Ariégeois au grand cœur, de 28 ans.
C’est par le biais de ces communautés notamment, qu’Arnaud sait le mieux exprimer qui il est vraiment, aussi paradoxal que cela puisse paraître!

C’est peut-être générationnel cette façon de communiquer ! C’est pour cela aussi qu’il m’a semblé important de pouvoir montrer, au travers de son regard, comment les jeunesses actuelles apportent leurs contributions au monde par ces outils.

J’emploie le mot “outil”, mais lui et bien d’autres pourraient les décrire comme des espaces de partage. Les communautés avec lesquelles il communique sont comme une seconde famille dans laquelle chacun trouve ce qui peut lui manquer dans la réalité non virtuelle, dans laquelle chacun ose être qui il souhaite être, aussi…

C’est ainsi que je vous livre le portrait de ce personnage atypique, sommelier et organisateur d’événement e-sport* caritatifs.

J’espère retransmettre dans les lignes qui suivent toute l’authenticité qu’il a su me montrer.

*Le sport électronique, ou e-sport en Anglais, désigne des compétitions de jeux vidéo en réseau local ou via internet sur consoles ou ordinateurs.
Les joueurs professionnels (appelés «pro gamers» en Anglais) évoluent en individuel ou appartiennent à une équipe, s’astreignant à un entraînement quotidien de plusieurs heures, ils participent aux compétitions organisées à travers le monde et vivent des gains remportés.

Commençons par tes racines, d’où viens-tu ?

Je suis né en Ariège j’ai grandi à Montaut, entouré de mes 7 frères et sœurs. J’ai fait un BEP et un BAC pro hôtellerie restauration à St Girons puis une mention complémentaire en sommellerie à Blagnac. Mes diplômes obtenus, j’ai commencé à travailler à Toulouse en tant que responsable de salle de restaurant.
Je reviens très souvent en Ariège car c’est ici que se trouve ma famille et que j’y ai développé mon association, « le cœur aux manettes », une association caritative créée et animée par des jeunes. Pour moi l’Ariège c’est quelque chose de protecteur, la vie simple, boire et manger. La solution à beaucoup de maladies sociétales, cf. « le mal a dit » !

Quelles sont tes passions et inspirations ?

Les jeux vidéo bien évidement, mais aussi la cuisine, qui est quelque chose de très lié à l’environnent pour moi, voire même une philosophie de vie maintenant.
J’adore l’événementiel aussi, l’aspect organisation et challenge.

Je suis très inspiré par la pop culture, Dragon Ball est l’œuvre qui m’a le plus inspiré petit, ça m’évoque les arts martiaux, le fait de parcourir le monde et chercher à se dépasser sans cesse.
C’est l’histoire d’un gars de la campagne aussi qui porte les valeurs de l’amitié au plus haut. Je m’y réfère dans mon quotidien et ça m’a guidé dans ma jeunesse.
Avoir vécu des challenges me permet de ne plus avoir peur de me lancer dans de nouveaux projets. Je suis devenu plus fort en me poussant à dépasser mes propres rivaux, c’est à dire moi-même en premier lieu, mais aussi les personnes qui font de l’événementiel en ligne.

Côté musique, le Hip-Hop et le rap des années 90 c’est quelque chose de fort là aussi pour moi. « Iam » au Lycée c’est quelque chose qui a changé ma vie, ça m’a donné envie de lire des livres parce que les rappeurs faisaient beaucoup de citations dans leurs textes comme Tolstoï, ou encore Boris Vian et l’Arrache cœur… du coup je les achetais et je les lisais pour comprendre de quoi ils parlaient. Ça m’a même amené à m’intéresser à l’art, j’aime beaucoup Kandinsky depuis.

Tes valeurs ? Ton engagement ? ( ce qu’il appelle «le cœur»)

Les valeurs de la ruralité je pense ! La famille, les amis, cultiver son jardin et aller vers l’autosuffisance, le développement personnel qui représente pour moi d’être bien dans son corps et dans sa tête, l’environnement (car ses engagements sont nombreux !) je fais partie de l’association ESE 65 (Eau Sport Environnement en 65) grâce à laquelle je fais du ramassage de déchets sur les plages pendant les vacances mais aussi des rencontres et activités.

J’ai été inspiré là aussi par un manga dans lequel les habitants d’un village pauvre préféraient acheter une télé sans antenne plutôt qu’une nourriture saine leur permettant de survivre.
Je me suis concentré à ce moment-là sur ce que je mangeais, la saisonnalité, puis je me suis rendu compte qu’il y avait du plastique dans le poisson que nous consommons et c’est comme ça que j’en suis venu à aller nettoyer les plages et faire en sorte que l’on arrête de s’empoisonner.

Une autre valeur importante à mes yeux est l’authenticité, pouvoir se permettre de dire les choses importantes quand il le faut : « Soyons d’accord de ne pas toujours l’être », comme le dit Orelsan.

Quels sont tes traits de personnalité ?

Je dirais que je suis quelqu’un de curieux, je me passionne pour tout, dès qu’un sujet m’intéresse je veux tout savoir : Werber et sa trilogie des fourmis par exemple, a été une obsession après l’avoir découvert !
Bon j’admets que parfois je peux laisser aussi vite tomber que la passion m’a prise !
Comme la passion de la magie pour laquelle j’ai acheté des tonnes de matériel… mais je ne sais toujours faire qu’un seul tour !

Mais ça peut se traduire aussi par le fait que je suis capable d’écouter tout le monde, j’aime m’ouvrir et m’intéresser à l’autre pour en apprendre davantage.
J’aime la tranquillité et rester anonyme au milieu des foules mais je suis assez paradoxal dans le sens où je suis aussi heureux seul qu’entouré.

Quelques exemples d’actions menées par l’association en Ariège …

  • Stand et concours à l’occasion du festival “Celt en Oc’”, à Montaut en juin 2022 (image 1 et 2)
  • Levée de fonds (1900 euros) et parrainage du rêve de Maëlle via l’association « Rêves », une association qui réalise les rêves des enfants très gravement malades – Janvier 2022 (image 3)
  • Participation bénévole et solidaire lors de la Saint Patrick organisée par Padènes compagnie – Mars 2022 (image4)
  • Collecte de 2280 euros afin de permettre à l‘association « Petit Cœur De Beurre» de financer deux fauteuils-lits pour accompagnants qui permettront aux parents de rester auprès de leur enfant au CHIVA (Hôpital de Foix) (image 5).
  • Mais ce sont aussi des collectes alimentaires pour les restos du cœur (282kg de denrées),
  • des clean up days (ramassage de 700 kg déchets dans la nature – image 6),
  • un live cuisine de repas à destination de personnes en grande précarité… (image 7)

Bref, indéniablement une association qui ne manque pas d’énergie ni de volonté quand il s’agit de s’engager en faveur de nobles causes, encore une preuve, s’il en est besoin, que les jeunes agissent efficacement pour construire un monde plus solidaire, plus juste et respectueux de l’environnement.

Mais alors, comment ça se passe une levée de fonds pour des associations?

Un tournoi de e-sport caritatif est un événement en ligne et en direct qui dure 1 à 2 jours en général et au cours duquel des joueurs s’affrontent sur des jeux vidéo et appellent les spectateurs à faire des dons, du montant de leur choix.

Bien-sûr on n’assiste pas seulement au duel des joueur.euses, les bénévoles de l’association se chargent de l’animation en proposant des quizz, des challenges, des blagues avec des interactions proposées via le tchat.

Comment t’est venue l’idée de la création de cette association ?

J’ai été inspiré par le Z event français qui a rassemblé cette année plus de 10 millions d’euros pour des association écologistes et pas moins de 350 000 spectateurs.
Cet événement représente un signal d’engagement fort des jeunesses actuelles qui se mobilisent à leur façon, c’est à dire entre pairs, sur un temps restreint (1 à 2 jours) et avec la volonté d’avoir l’impact le plus important possible.

C’est parti d’une remise en question sur mon travail pendant le confinement, car le restaurant dans lequel je travaillais était fermé pendant des mois.
J’ai donc replongé dans les jeux vidéo, la culture pop de mon enfance et tout cet univers.

Puis lors d’un nouvel an avec des copains du collège, au moment des résolutions, on a fait le pari que chacun d’entre nous pourrait créer un événement qui lui tient à cœur. Je voulais avoir un organisme pouvant convaincre les gens de me prêter des salles pour pouvoir organiser des évents caritatifs et j’ai donc créé mon association.
C’est suite à ça qu’est arrivé le premier événement pour « petit cœur de beurre ». Ça a marché et quand j’ai vu les lits à l’hôpital je me suis rendu compte de l’importance de ce qu’on était en train de faire, c’était très concret.

Mais ça prenait beaucoup de temps sur ma vie et j’avais repris le travail à fond…
A la sortie du confinement, je me suis senti en rupture totale avec mon quotidien au restaurant : le rythme infernal, le temps passé sur le lieu, aller au travail deux fois par jour, être obligé de sociabiliser même quand on n’en a pas l’envie. J’aime être derrière mon écran parce que je peux y décider de mes interactions avec les gens, dans la vie réelle on ne le peut pas et ça m’angoisse parfois.
La notion de temps consacré à soi-même et à ce qui fait sens pour nous est devenue très importante à partir de là, petit à petit j’ai pris conscience que gérer mon temps, en reprendre le contrôle était ce qui devenait ma priorité.
Pour pouvoir continuer à me consacrer à ça et après avoir passé le flambeau au sein du restaurant, je travaille actuellement sur un projet d’entrepreneuriat autour de l’alimentation, en parallèle de mes activités bénévoles.

Quelles ont été tes premières difficultés ?

Trouver un financement pour commencer et me fournir en matériel, parler en public (une conférence devant 340 personnes c’est différent de parler en live !) trouver une salle avec du matériel.
J’étais heureux après tous ces efforts de me rendre compte que c’était vraiment « mon truc ».

L’univers « stream » (des joueurs en ligne) est très difficile et très exigeant car il faut pouvoir créer une communauté et ça nécessite d’être attentif en permanence à ce qui se passe sur sa plateforme, de savoir prendre du recul, de repousser ses barrières. C’est aussi des remises en question et un investissement énorme pour des résultats variables.
Mais les abonnés (souvent des jeunes) payent pour faire partie de ma communauté, ça veut dire qu’ils me soutiennent et que je n’ai pas le droit de me laisser décourager.

Quelle est ta vision des rapports des jeunes avec les réseaux et plate-formes ?

Une communauté ça représente aussi de l’entraide, du soutien, on est connectés en permanence, c’est comme un cocon positif qui se créé, un réseau social, c’est vraiment quelque chose de social dans le sens où on y partage des choses personnelles, qu’on n’arrive parfois pas à partager avec nos proches, un peu comme un psy qui est neutre et avec qui tout dire n’aura pas d’impact sur la continuité de son quotidien.

Je pense que, pour les jeunes, il y a beaucoup d’isolement dans la vie non virtuelle, encore plus lors de la période covid, et que cet espace est un moyen de ne pas se sentir seul.e.
C’est un mode de relation personnalisé, qui n’est pas en surface, pas éphémère comme quand on discute avec quelqu’un de sympathique, voire passionnant lors d’une soirée, mais qu’ensuite on ne reverra pas parce qu’on repartira chacun de notre côté.

Ça implique d’instaurer une juste distance par contre, par exemple il y a des règles dans ma communauté : le respect, dire bonjour, être clair et transparent.
Sur les plates-formes comme Twitch, pour les filles, c’est très compliqué. Elles y subissent énormément de harcèlement au quotidien car c’est un espace très marqué par les hommes. Il y a des dangers, de la perversion, des violences et des cercles de violence qui existent de plus en plus dans notre société et donc se révèlent aussi dans les espaces en ligne. Ces plates-formes étudient actuellement la possibilité de ne plus être une personne anonyme sur internet, ce qui réglerait beaucoup de problèmes à mon sens.

Tes ambitions et projets pour l’asso ?

J’ai un projet en cours avec l’école de commerce ESG Sports à Labège, une école de management sportive ; les étudiant.es de l’école vont participer à la diffusion et à l’organisation de l’événement.
On a aussi prévu un événement Ariègeois avec Infos Jeunes en décembre ou février, en espérant que la fibre fonctionne, car c’est la clé de notre réussite !
Petit à petit l’association commence à être repérée et c’est très motivant, si ça venait à grandir encore, je n’exclurai pas d’en faire mon activité principale !

Qu’est-ce que tu dirais à des jeunes qui ont des projets ?

Allez au bout même si personne n’y croit ! Faites des erreurs car c’est comme ça qu’on apprend ! Gardez confiance en ce qui vous anime, surtout quand on vous dit de ne pas le faire.

Merci pour cette interview très riche et authentique !

Interview réalisée par Laura Sonneville – AJIR

Un projet soutenu par le FDLA avec l’obtention récente d’une aide de 1000 euros pour les équipements matériels nécessaires à la tenue du prochain événement.

Pour les soutenir vous pouvez :

  • vous abonner à leur page Facebook Le Cœur Aux Manettes
  • parler d’eux autour de vous,
  • proposer d’accueillir leur prochain événement si vous disposez de grands et beaux locaux équipés de la fibre
  • ou bien faire des dons ou acheter l’un de leur produit en boutique pour le cadeau de noël de votre petit neveu ou nièce !
  • Découvrez aussi la nouvelle boutique Le cœur aux manettes !